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Interview de Frédéric GROUILLER - Lauréat Prix #ingESEO 2023

Portraits d'Ingénieurs

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08/07/2024

Frédéric GROUILLER (promo THOMSON - 2005) est responsable de la section IRM HUG-UNIGE au centre de recherche CIBM à Genève. 

Lauréat du Prix #ingESEO 2023 dans la catégorie Innovation et Recherche, il a accepté de répondre à nos questions pour en savoir plus sur son parcours, son poste actuel et les liens avec sa formation ESEO.


Comment es-tu arrivé à te spécialiser dans l'imagerie IRM clinique et quelles sont les motivations qui t'ont poussé vers ce domaine ?

J'ai toujours été attiré par des carrières qui ont un impact significatif sur la société.

Lors de mes stages, j'ai eu l'occasion de découvrir successivement la recherche clinique et la neuroimagerie, notamment lors de ma dernière année d'études. L’imagerie cérébrale et le fonctionnement du cerveau m'a fasciné et j’ai été surpris de découvrir toutes les opportunités offertes par ma formation d'ingénieur polyvalent dans ce domaine. J’ai donc souhaité poursuivre dans cette voie en réalisant une thèse. J’ai alors cherché un sujet qui correspondait à mes attentes et je l’ai trouvé à l’Institut des Neurosciences de Grenoble, pour développer des enregistrements électroencéphalographiques simultanés avec les acquisitions IRM afin d’établir une cartographie préchirurgicale du cerveau épileptique. Je me suis alors rendu compte que ma formation était vraiment un atout dans ce milieu et qu’il y avait des applications cliniques directes à mes recherches, ce qui est extrêmement motivant.


Quels ont été les moments clés de ta formation à l'ESEO et comment cette expérience t'a-t-elle préparé à ta carrière actuelle ?

À l’époque, il n’y avait pas encore d’option biomédicale à l’ESEO. Cependant, j’ai choisi de suivre un double cursus en réalisant un master de recherche en Signaux et Images en Biologie et Médecine à la Faculté de Médecine d’Angers, parallèlement à ma dernière année d’études. 

Sans ce double cursus, je n’aurais pas pu construire ma carrière actuelle. 

Ma réussite repose également sur la diversité et la complémentarité des matières enseignées à l’ESEO.

Celles-ci m’ont permis de développer un profil complet, capable de comprendre la physique de l’IRM, le hardware, les techniques d’acquisition et le traitement des signaux. 

Aujourd’hui, je réalise que la plupart des cours m’ont été utiles à un moment ou à un autre, que ce soit la physique quantique, les antennes, la programmation, le traitement du signal et de l’image. De plus, des compétences en gestion de projet, communication et management sont indispensables pour diriger des travaux de recherche et gérer une équipe.


Pourquoi as-tu choisi de travailler à l'Université de Genève et quelles sont tes missions principales en tant que responsable d'un centre de recherche ?

Après ma thèse, j'ai été attiré par l'environnement exceptionnel de Genève, une ville à échelle humaine offrant à la fois une dimension internationale et une proximité avec les montagnes. La collaboration étroite entre l'Université et les hôpitaux facilite la réalisation de projets de recherche clinique. Le CIBM est un centre de recherche multidisciplinaire de renommée internationale, fondé grâce à la coopération de cinq institutions pour promouvoir l'excellence en imagerie biomédicale.

En tant que responsable de la section IRM HUG-UNIGE, mon rôle principal est de développer la recherche clinique en IRM et de soutenir les médecins dans le développement de leurs idées. Mes missions principales incluent la recherche, le service et l’enseignement. Mon travail consiste à conduire des projets de recherche innovants, à offrir des services de pointe en imagerie aux cliniciens, et à former la prochaine génération de chercheurs et de professionnels de santé dans ce domaine. 


Quels conseils donnerais-tu aux étudiants intéressés par une carrière en recherche scientifique, notamment dans le domaine de l'imagerie médicale ?

Pour réussir dans une carrière en recherche scientifique, et particulièrement en imagerie médicale, il est essentiel d'être passionné. Ce domaine demande un investissement personnel important.

Il est également primordial de comprendre que la recherche scientifique n’est pas le choix de carrière le plus lucratif, mais elle offre des récompenses immenses en termes de satisfaction intellectuelle et de contributions significatives à la société

Vous devez aimer la multidisciplinarité, car l'imagerie médicale combine des connaissances en physique, biologie, médecine, informatique et ingénierie. Être ouvert à l'interdisciplinarité vous permettra de collaborer efficacement avec des experts de différents domaines et d'enrichir vos propres compétences.


N'ayez pas peur d’explorer l'inconnu, car c’est un voyage vers des territoires inexplorés. La curiosité et le courage d'affronter l'incertitude sont des qualités indispensables.


Soyez prêt à apprendre constamment et à vous adapter, car le domaine de l’imagerie médicale évolue rapidement avec les nouvelles technologies et les découvertes scientifiques.


En quoi consiste tes projets de recherche actuels en neuroimagerie multimodale et quelles sont leurs applications potentielles en neurologie, neurochirurgie et psychiatrie ?

Mes projets de recherche sont centrés sur l'innovation technologique, l'imagerie multimodale (c’est-à-dire la combinaison de plusieurs techniques) et les applications cliniques. J'ai plusieurs axes de recherche. 

L’un d'eux est l'amélioration de la localisation des fonctions cérébrales essentielles à préserver pendant la chirurgie. Pour opérer un patient atteint d'une tumeur ou souffrant d'épilepsie, le neurochirurgien a besoin d'une cartographie précise des zones pathologiques à enlever ainsi que des zones essentielles à préserver afin de garantir le meilleur traitement tout en assurant une qualité de vie optimale au patient. Nous développons donc de nouvelles techniques quantitatives et non invasives pour établir cette cartographie, en utilisant notamment l'IRM à ultra-haut champ pour améliorer la résolution spatiale.

Un autre axe de recherche combine la réalité virtuelle avec l’électroencéphalographie pour aider les enfants ayant des troubles de l’attention à auto-réguler leur attention dans un environnement de classe virtuelle. Grâce à cette approche, nous espérons pouvoir réduire le recours aux médicaments chez ces enfants.


Peux-tu nous parler d'une collaboration internationale marquante que tu as eu l'occasion de mener dans le cadre de tes recherches ?

Au cours des dernières années, j'ai eu l'occasion de développer de nombreuses collaborations internationales, notamment en Europe, aux États-Unis et au Canada. La plus marquante a été initiée lorsque nous recherchions des patients très spécifiques pour valider une nouvelle technique de localisation des zones épileptiques en utilisant l'EEG et l'IRM fonctionnelle. À Genève et en Suisse, nous n'avions pas assez de patients, et très peu de centres utilisaient ces enregistrements simultanés d'EEG et d'IRMf.

Pour surmonter cette limitation, nous avons établi une collaboration avec deux autres centres, à Londres en Angleterre et à Kiel en Allemagne, afin d'obtenir davantage de données. J'ai donc eu l'occasion d'analyser des données de patients anglais et allemands. Cette collaboration a été essentielle pour avancer dans nos recherches et a renforcé l'importance des partenariats internationaux dans le développement de nouvelles techniques médicales.


Comment vois-tu l'avenir de l'imagerie médicale et de la recherche en neurosciences, en tenant compte des avancées technologiques et des enjeux sociétaux ?

Je pense que nous sommes en train d'atteindre un plafond en termes de développement technologique des machines elles-mêmes. L'avenir réside désormais dans l'intégration de l'intelligence artificielle (IA) et du big data, qui peuvent considérablement améliorer la qualité des images, réduire les temps d'acquisition et aider au diagnostic. Grâce à l'IA, nous pourrons analyser des quantités massives de données avec une précision et une rapidité sans précédent, ouvrant la voie à des diagnostics plus précoces et plus précis.

Un autre enjeu majeur est la médecine personnalisée. Chaque patient est unique, et les traitements doivent être adaptés à leurs spécificités génétiques, biologiques et environnementales. L'imagerie médicale, couplée à des analyses de big data, permettra de développer des protocoles de traitement sur mesure, optimisant ainsi l'efficacité des interventions et minimisant les effets secondaires.

En parallèle, les avancées en neurosciences ouvriront de nouvelles perspectives sur la compréhension du cerveau et des maladies neurologiques. L'utilisation de technologies tel que l'IRM à ultra-haut champ combiné à l'IA, facilitera la cartographie précise des fonctions cérébrales et des anomalies pathologiques.


Cependant, ces progrès technologiques doivent être accompagnés d'une réflexion éthique et sociétale. 


La gestion des données personnelles, le respect de la vie privée et l'accès équitable aux nouvelles technologies sont des enjeux cruciaux. Une grande partie de la population mondiale n’a pas accès à des techniques d’imagerie avancées. Il est impératif de garantir que les avancées bénéficient à tous les patients, indépendamment de leur origine ou de leur situation économique. Nous devons donc faire un effort pour développer des solutions technologiques qui garantissent l'accès aux soins même dans les pays en voie de développement, où le réseau électrique ou l’accès à Internet ne sont pas systématiques.


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